SNAP Canada

Rattraper le temps perdu

La SNAP s’efforce d’aider le Canada à atteindre de nouveaux objectifs ambitieux et à maintenir sa réputation de chef de file mondial de la conservation

CET ARTICLE A ÉTÉ PUBLIÉ DANS LE NUMÉRO D’AUTOMNE 2021/HIVER 2022 DE TOUTE NATURE.

L’image du Canada en tant que champion de la conservation est sur la sellette. On a vu Ottawa promettre à maintes reprises de faire figure de modèle dans le monde, notamment en s’engageant à protéger 25 % de ses océans et de ses terres d’ici 2025 et 30 % d’ici 2030. Pourtant, l’an dernier, le pays a manqué à son engagement, bien moins ambitieux, de protéger seulement 17 % de ses terres et de ses eaux à l’horizon. Face à cet échec, le Canada ne peut plus se permettre de manquer ses nouveaux objectifs, au risque de décevoir une fois de plus la communauté internationale – et la population canadienne.

Les organisations de conservation comme la SNAP Canada jouent un rôle essentiel pour assurer que les efforts du
pays restent sur la bonne voie.

Lac Legault avec le Mont Kaaikop en arrière-plan, Laurentides, Québec. Photo : Hummingbird Art
UN CHAMPION MONDIAL DE LA CONSERVATION

« Avec ses vastes étendues sauvages et le plus long littoral du monde, beaucoup de pays attendent du Canada qu’il montre la voie à suivre en matière de protection de la nature », constate Sandra Schwartz, directrice générale nationale de la SNAP Canada. « Les groupes de conservation comme le nôtre ont un rôle essentiel à jouer pour encourager le gouvernement à se montrer à la hauteur de ces attentes. »

Le Canada est depuis longtemps considéré comme un chef de file international de la conservation. Il y a environ trente ans, il est devenu le premier pays industrialisé à signer la Convention sur la diversité biologique (CDB) des Nations Unies. Peu de temps après, il est devenu l’hôte permanent du Secrétariat international de la Convention à Montréal. En 2010, il était parmi quelque 200 pays signataires ayant fixé des jalons clés en matière de  conservation pour 2020, notamment des objectifs visant à protéger 10 % des océans et 17 % des terres et des eaux intérieures.

Puis, pendant de nombreuses années, le Canada a semblé s’effacer de la scène internationale de la conservation. Même à l’approche de l’échéance de 2020, le pays a tardé à annoncer ses propres buts et objectifs nationaux. Bien que des efforts concertés de dernière minute aient assuré quelques résultats – notamment l’augmentation de la
superficie des aires marines protégées canadiennes à 13,8 % – le Canada a terminé l’année 2020 avec seulement
13,1 % de ses terres protégées, bien loin des 17 % promis.

« C’était décevant », se souvient Alison Woodley, conseillère stratégique principale au bureau national de la SNAP Canada. « Le Canada a failli à son engagement, car pendant de nombreuses années, il n’a pas pris la conservation  au sérieux. Quand il s’est finalement réveillé, il était déjà trop tard. »

LA PROTECTION DE LA NATURE, UN ENJEU DE TAILLE

Nombre de chercheurs s’accordent à dire que la protection de vastes zones de la planète peut aider à stopper l’extinction des espèces. Selon les recherches, une protection d’au moins 30 % et jusqu’à 70 % des écosystèmes
terrestres et marins peut préserver la santé de la planète et permettre à la nature de continuer à fournir des services écosystémiques à l’humanité.

Ces dernières années, le Canada a été l’un des premiers à défendre cette approche. En 2020, par exemple, il s’est
joint à des dizaines d’autres pays au sein de la Coalition de haute ambition pour la nature et les peuples, par laquelle il s’est engagé à protéger 30 % des terres et des océans d’ici la fin de la décennie. En juin 2021, le pays a
signé un engagement semblable avec les nations du G7 dans un document intitulé Pacte du G7 pour la nature à
l’horizon 2030.

Cependant, l’incapacité du Canada à atteindre son objectif de 2020 en matière de protection des terres au titre de la CDB des Nations Unies a jeté une ombre sur ses nouveaux engagements ambitieux. Or, pour les tenir, le pays
devra presque doubler la superficie de ses terres actuellement protégées au cours des quatre prochaines années. «
Si nous voulons montrer au monde que nous prenons au sérieux la question des aires protégées, il n’y a pas de  temps à perdre », affirme Mme Woodley.

UN BULLETIN DE NOTES POUR LES AIRES PROTÉGÉES

Pour contribuer à ce travail, la SNAP Canada a tout récemment lancé un nouvel outil pour évaluer les aires protégées. Intitulée Les notes enfin dévoilées : un bulletin sur les progrès en protection du territoire au Canada, cette première édition a été publiée cet été, et la SNAP s’en servira comme référence pour évaluer les progrès du Canada dans l’atteinte des nouveaux objectifs dans les années à venir.

Ce premier bulletin couvre la dernière décennie et attribue des notes au gouvernement fédéral et à ceux des provinces et territoires en fonction de leurs progrès vers la réalisation – ou non – des objectifs de protection de 2020. Les notes serviront de référence et faciliteront l’adoption de mesures de conservation plus efficaces à l’avenir.

Un autre moyen consiste à soutenir et à encourager la conservation menée par les Autochtones. Par exemple, la SNAP Canada soutient plusieurs projets de conservation à grande échelle, comme la protection du bassin  hydrographique de la rivière Seal. Ce projet prévoit la création d’une aire protégée autochtone de 50 000 km carrés dans le nord du Manitoba.

LE MONDE NOUS REGARDE

Il est par ailleurs utile de rappeler au Canada que le reste du monde a les yeux rivés sur lui. En septembre, la SNAP Canada a cosigné la motion 101, présentée lors du Congrès mondial de la nature de l’Union internationale pour
la conservation de la nature (UICN), visant à reconnaître la nécessité de conserver à terme au moins la moitié de la planète comme moyen de contrer efficacement la double crise de la perte de biodiversité et des changements climatiques.

La motion reconnaît également l’importance des peuples autochtones et appelle au respect de leurs droits dans toutes les initiatives de conservation. La motion, rédigée conjointement par la SNAP Canada, la WILD Foundation, la Yellowstoneto-Yukon Conservation Initiative et d’autres ONG partenaires, a été approuvée par les délégués de l’UICN qui représentaient des dizaines de pays, des groupes de conservation et des organisations autochtones.

Même si les nouveaux objectifs du pays en matière d’aires protégées semblent ambitieux par rapport aux objectifs
précédents (et, en partie, non atteints), le Canada peut cette fois profiter de cette dynamique. Encouragé par la SNAP Canada et d’autres organisations, Ottawa s’est engagé à consacrer plus de 3 milliards de dollars à la  conservation de la nature dans le budget fédéral de 2021, y compris un soutien aux partenaires des gouvernements
autochtones, provinciaux et territoriaux et aux ONG pour contribuer à la réalisation des objectifs en matière d’aires protégées.

Ainsi, à l’aide des efforts de la SNAP Canada et d’autres organisations, il y a lieu d’espérer que le Canada pourra tenir sa promesse de redevenir le chef de file mondial de la conservation.