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Opinion : Face au péril qui menace la planète, le Canada doit prendre au sérieux la protection de la nature

PAR SANDRA SCHWARTZ ET SHAWN MCCARTHY – 8 DÉCEMBRE 2022

Alors que les nations se réunissent à Montréal dans le cadre de la COP15, le gouvernement canadien doit passer de la parole aux actes pour protéger la nature et la biodiversité.

Les scientifiques l’appellent « la sixième extinction ». Un rapport américain de 2017 propose un autre terme imagé pour décrire l’impact de l’humanité sur les autres espèces de la Terre : l’annihilation biologique.

La nature nous fait vivre grâce à la diversité de la vie animale et végétale. Cette vie pollinise nos cultures, préserve la qualité de l’air, de l’eau et du sol, et régule le climat. La nature nous procure également des bienfaits mentaux, physiques et spirituels.

Lisez l’éditorial publié dans National Observer le 8 decembre 2022. (en Anglais)

Texte intégral ci-dessous.


Op-Ed : Face au péril qui menace la planète, le Canada doit prendre au sérieux la protection de la nature

PAR SANDRA SCHWARTZ ET SHAWN MCCARTHY – 8 DÉCEMBRE 2022

Alors que les nations se réunissent à Montréal dans le cadre de la COP15, le gouvernement canadien doit passer de la parole aux actes pour protéger la nature et la biodiversité.

Les scientifiques l’appellent « la sixième extinction ». Un rapport américain de 2017 propose un autre terme imagé pour décrire l’impact de l’humanité sur les autres espèces de la Terre : l’annihilation biologique.

La nature nous fait vivre grâce à la diversité de la vie animale et végétale. Cette vie pollinise nos cultures, préserve la qualité de l’air, de l’eau et du sol, et régule le climat. La nature nous procure également des bienfaits mentaux, physiques et spirituels.

Cependant, nous perdons rapidement des éléments essentiels de nos écosystèmes.

Un rapport mondial de 2019 sur la biodiversité et les services écosystémiques a conclu que les actions humaines constituent désormais une menace d’extinction pour plus d’un million d’espèces dans le monde, plus que jamais auparavant. Au Canada, la viabilité de 20 % des espèces sauvages est menacée, selon un rapport publié le 29 novembre par Environnement et Changement climatique Canada.

Le rapport de 2017 publié dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences souligne que l’examen des seules espèces en voie d’extinction ne donne pas une image complète de la situation. Sur les 177 espèces de mammifères examinées par les chercheurs, plus de 40 % traversent de graves reculs de population.

La planète Terre « connaît un énorme épisode de déclin et de disparition de populations [extinctions locales], qui aura des conséquences négatives en cascade sur le fonctionnement des écosystèmes et les services vitaux pour le maintien de la civilisation », indique le rapport.

Ce mois-ci, des représentants de 196 nations se réunissent à Montréal dans le cadre d’un effort mondial visant à éviter une catastrophe environnementale. Ce sommet sur la biodiversité parrainé par les Nations unies – la COP15 – se déroule du 7 au 19 décembre. Il vise à établir un ambitieux cadre international dans lequel les gouvernements s’engagent à transformer fondamentalement la façon dont nous traitons le monde naturel en préservant les habitats et en protégeant les espèces en danger.

Nous avons besoin d’un engagement décisif qui galvanise l’action mondiale pour protéger la nature. Un tel engagement est essentiel non seulement pour notre propre bien, mais aussi pour celui des générations futures et pour la santé même de la planète.

Le constat est le même que pour les changements climatiques : il nous reste peu de temps pour stopper et inverser les dégâts.

La COP15, qui se tient au Canada, devait se dérouler en Chine, mais a dû être déplacée en raison de la pandémie de COVID-19. Le gouvernement canadien doit maintenant faire sa part pour que le sommet aboutisse à un accord qui comporte des engagements en faveur d’actions ambitieuses, transparentes et mesurables.

Cela signifie qu’il faut passer de la parole aux actes dans notre propre cour.

Mercredi, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé un financement de 800 millions de dollars sur sept ans pour de grands projets de conservation menés par les Autochtones et couvrant près d’un million de kilomètres carrés de terres. Cela représente un engagement important, mais il faudra en faire plus dans les années à venir.

La protection de la nature préserve la biodiversité et contribue à lutter contre les changements climatiques en protégeant les écosystèmes qui stockent le carbone. Elle offre une protection contre les inondations, les vagues de chaleur et l’élévation du niveau de la mer, et permet aux espèces de s’adapter aux conditions climatiques changeantes.

Le gouvernement fédéral s’est engagé à protéger 30 % de la masse continentale du Canada et 30 % du territoire océanique du Canada d’ici 2030. Comme il est maintenant prouvé qu’il faut protéger au moins la moitié de la planète pour inverser l’effondrement de la nature et lutter contre les changements climatiques, le respect de cet engagement serait un pas essentiel dans la bonne direction.

Cela nécessitera un effort de la part de l’ensemble du gouvernement.

Tous les ministères et organismes fédéraux doivent aligner leurs politiques sur l’objectif de préservation de la biodiversité. Tandis que le Canada poursuit le développement d’importants minéraux nécessaires à la lutte contre les changements climatiques, il faut immédiatement prioriser la protection de l’habitat d’espèces menacées, comme le caribou et les coraux d’eau profonde, et la sauvegarde des écosystèmes riches en carbone, comme les tourbières et les zones humides côtières, qui jouent un rôle crucial dans la lutte contre les changements climatiques.

Les engagements du Canada doivent être reflétés dans le prochain budget de la ministre des Finances Chrystia Freeland. Le gouvernement fédéral a fait d’importants investissements à court terme pour soutenir les actions de conservation. Mais un financement permanent est nécessaire pour soutenir les efforts de conservation qui visent à atteindre les objectifs de l’initiative 30X30 pour les terres et les océans, en particulier le travail important réalisé par les peuples autochtones.

Le soutien aux efforts de conservation menés par les Autochtones est vital pour la protection de la nature et de la vie sauvage, et constitue un élément essentiel de la réconciliation. Toutes les mesures visant à conserver et à restaurer les écosystèmes doivent être prises en partenariat avec les communautés autochtones locales.

En même temps, les gouvernements provinciaux et territoriaux doivent travailler avec Ottawa pour atteindre les objectifs de conservation ambitieux mais réalisables, puisqu’ils sont les premiers responsables des décisions sur la gestion des terres au Canada.

Plusieurs provinces sont loin d’avoir pris les mesures nécessaires pour protéger l’habitat essentiel des espèces actuellement en péril et de celles qui seront menacées à l’avenir.

La loi ontarienne de 2022 visant à accélérer la construction de plus de logements, adoptée le 28 novembre, menace d’importantes aires de conservation dans la ceinture de verdure de la province. Bien que de nouveaux logements soient désespérément nécessaires, la destruction de nos espaces naturels pour le développement n’est pas une solution durable.

Le temps est venu de mettre fin à notre myopie. La nature n’est pas qu’une simple ressource à exploiter pour un bénéfice à court terme ou à éliminer au nom du progrès. Le sommet sur la biodiversité qui se tient à Montréal est l’occasion pour les gouvernements du monde entier de reconnaître la nécessité d’un changement fondamental et de prendre des mesures concrètes.

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Sandra Schwartz est la directrice générale nationale de la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP Canada). Mme Schwartz a occupé un large éventail de postes dans les domaines de la politique publique, des communications stratégiques et de la politique. Elle a ardemment défendu la création d’une politique environnementale saine et a soutenu des idées progressistes en matière d’énergie propre et de lutte contre les changements climatiques.

Shawn McCarthy est un auteur indépendant et un conseiller principal du Sussex Strategy Group. Il était auparavant correspondant national pour le Globe and Mail, pour le compte duquel il couvrait le secteur mondial de l’énergie.