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Opinion : Le Canada se fait un point d’honneur de contribuer à la conclusion d’un contrat mondial visant à stopper la perte de biodiversité, mais il doit aussi agir ici pour endiguer le déclin de la nature

À la COP15, le Canada peut susciter un élan en faveur d’un nouvel accord mondial sur la biodiversité

Depuis des décennies, les scientifiques du monde entier tirent la sonnette d’alarme sur la surexploitation de la nature, cause de la crise de la disparition des espèces qui menace la survie même de notre civilisation.

Déjà en 1986, lors d’un forum de l’Académie nationale des sciences des États-Unis, des scientifiques affirmaient que la perte de biodiversité représentait un risque pour l’humanité; risque qui n’était surpassé que par celui d’une guerre thermonucléaire.

Pourtant, nous n’avons rien fait, et la crise n’a fait que s’aggraver, sous l’effet de la dégradation et de la destruction des habitats et de l’exploitation des espèces.

Lisez l’éditorial publié dans The Hill Times le 12 decembre 2022. (en Anglais)

Texte intégral ci-dessous.


Le Canada se fait un point d’honneur de contribuer à la conclusion d’un contrat mondial visant à stopper la perte de biodiversité, mais il doit aussi agir ici pour endiguer le déclin de la nature

À la COP15, le Canada peut susciter un élan en faveur d’un nouvel accord mondial sur la biodiversité

PAR GRAHAM SAUL ET SANDRA SCHWARTZ, le 12 décembre 2022

Depuis des décennies, les scientifiques du monde entier tirent la sonnette d’alarme sur la surexploitation de la nature, cause de la crise de la disparition des espèces qui menace la survie même de notre civilisation.

Déjà en 1986, lors d’un forum de l’Académie nationale des sciences des États-Unis, des scientifiques affirmaient que la perte de biodiversité représentait un risque pour l’humanité; risque qui n’était surpassé que par celui d’une guerre thermonucléaire.

Pourtant, nous n’avons rien fait, et la crise n’a fait que s’aggraver, sous l’effet de la dégradation et de la destruction des habitats et de l’exploitation des espèces.

Au Canada, des centaines de milliers d’hectares d’écosystèmes essentiels – de la forêt boréale aux coraux et éponges des grands fonds – sont endommagés et détruits chaque année, et plus d’un cinquième de toutes les espèces végétales et animales connues sont menacées d’extinction.

À l’échelle mondiale, les populations d’espéces sauvages ont reculé de 70 % au cours des 50 dernières années. Selon les Nations unies, le déclin de la nature se produit à un rythme sans précédent : un million d’espèces sont menacées, notamment un tiers des mammifères marins et plus de 40 % des espèces d’amphibiens.

La biodiversité est importante parce qu’elle nous procure de la nourriture, de l’eau potable et de l’air pur, ainsi qu’un climat stable indispensable à notre survie. Les insectes soutiennent une chaîne alimentaire qui comprend des centaines de milliers d’espèces et les trois quarts des cultures vivrières.

La biodiversité est importante parce que nous ne pourrons nullement limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré Celsius sans mieux protéger, gérer et restaurer la nature.

Enfin, la biodiversité est importante car, en tant qu’êtres humains, nous partageons cette planète avec d’innombrables autres espèces, qui ont autant le droit d’exister que nous.

Il est donc temps d’inverser la courbe de la perte de biodiversité et de mettre enfin un terme à la destruction de la nature.

La 15e Conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15) se tient actuellement à Montréal et poursuit un objectif crucial : donner lieu à un nouvel accord mondial visant à stopper et à inverser le déclin de la nature au cours de la présente décennie.

Le Canada, qui abrite de vastes étendues encore intactes de forêts, de milieux humides, de prairies, de littoraux et d’océans, peut jouer un rôle déterminant pour mobiliser les efforts mondiaux nécessaires à la conclusion d’un nouvel accord.

Il faut reconnaître que le Canada ne ménage pas ses efforts pour poser les bases de la réussite à Montréal. Par exemple, le gouvernement fédéral a pris des engagements ambitieux pour protéger davantage de terres et d’océans, promouvoir des solutions climatiques fondées sur la nature et stopper et inverser la perte de biodiversité.

Ces terres abritent par ailleurs plus de 600 communautés de peuples autochtones qui possèdent les connaissances et la compétence nécessaires pour gérer efficacement les habitats essentiels, et qui sont à l’avant-garde des initiatives de conservation menées par les Autochtones.

Selon un récent sondage Nanos, plus de 80 % de la population canadienne souhaite que le gouvernement intensifie ses actions pour protéger les terres et les océans du pays, notamment en assurant une protection d’au moins 30 % d’ici 2030.

À la COP15, le Canada peut susciter un élan en faveur d’un nouvel accord mondial sur la biodiversité. L’un des moyens les plus efficaces d’y parvenir consiste à donner l’exemple.

Dix-sept organisations environnementales nationales ont demandé aux pouvoirs publics de s’engager à élaborer un plan d’action national très ambitieux pour stopper et inverser la perte de biodiversité au Canada d’ici 2030.

Pour être efficace, ce plan d’action doit comporter des engagements visant à éliminer les subventions néfastes pour la nature, à financer de nouveaux corridors écologiques et à restaurer 20 % des écosystèmes dégradés, et notamment à protéger davantage de terres et d’océans.

Les groupes nationaux demandent également que les gouvernements :

  • Allouent un financement permanent pour protéger, avec la contribution du leadership des Autochtones, 30 % des terres et des océans du Canada d’ici 2030;
  • Renforcent le soutien aux solutions fondées sur la nature en vue de mieux valoriser et conserver la biodiversité et les écosystèmes riches en carbone du Canada, tout en garantissant et en protégeant les droits des Autochtones;
  • Instaurent de nouvelles mesures pour protéger les écosystèmes aquatiques par une meilleure gestion des eaux transfrontalières, des habitats des poissons et des océans;
  • Consacrent des fonds pour aider les pays en développement à protéger la biodiversité et à atteindre les objectifs internationaux

Le monde a trop attendu pour agir en faveur de la protection de la biodiversité. Nous ne pouvons pas nous permettre une autre décennie de promesses brisées et d’objectifs manqués.

Le monde entier a les yeux rivés sur Montréal – il est grand temps de passer à l’action.

C’est vrai que le Canada peut être le fer de lance d’un nouveau cadre mondial pour la protection de la biodiversité, mais il doit aussi agir dès maintenant pour mettre un terme à la destruction de la nature sur son propre territoire, et ce, par le biais d’un plan exhaustif et solidement financé qui accorde une place centrale aux droits et au leadership des peuples autochtones.

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Graham Saul est le directeur général de Nature Canada. Il compte plus de 25 ans d’expérience dans le domaine de la justice sociale et environnementale. Il a été directeur général du Réseau action climat Canada et directeur général d’Écologie Ottawa, dont il est membre fondateur.

Sandra Schwartz est la directrice générale nationale de la Société pour la nature et les parcs du Canada. Titulaire d’une maîtrise en gestion et en études environnementales et possédant plus de 20 ans d’expérience, elle est une fervente défenseuse de politiques environnementales robustes et une promotrice d’idées progressistes pour la lutte contre les changements climatiques.